Mes déceptions françaises ou la fin des illusions

13 mars 2014

Mes déceptions françaises ou la fin des illusions

À un seul jour de différence, j’ai eu deux entretiens d’embauche. L’un avec une commission formée de trois Français (hommes) et une Roumaine, l’autre avec un Britannique.

Juste au milieu du premier entretien, l’un des trois Français de la commission (un haut fonctionnaire, représentant de l’État français en Roumanie), me lance d’un coup :

– Excusez-moi, mais avez-vous des enfants? Et moi, très idiote, au lieu de rétorquer « Et en quoi cela affecterait mes compétences professionnelles? », je réponds : « Oui, j’ai un fils »

– Ah, avoir des enfants c’est un emploi à temps plein. Comment est-ce que vous pourriez faire face à la position de … qui vous demande de travailler en dehors du programme ?

Inutile de dire que mon CV montrait que j’avais eu l’occasion de très bien gérer deux emplois en même temps et que j’avais même poursuivi des études de doctorat.

J’ai juste compris que si on est mère, la carrière professionnelle doit prendre une pause ou éventuellement on doit se contenter des emplois à profil bas, plus modestes. Et si j’étais un homme et j’avais un enfant? Aurais-je pu assumer l’emploi en question?

Cela fait longtemps que je n’ai pas éprouvé un si fort sentiment de discrimination et d’injustice.

Pendant l’autre entretien, le spécialiste en Ressources humaines britannique ne m’a posé aucune question personnelle, rien qui soit en dehors de mes compétences professionnelles. Oui, on m’a demandé si j’étais disponible pour voyager et j’ai expliqué que j’avais toujours fait cela dans mon métier et que j’étais toujours prête à continuer à le faire.

Le premier entretien a duré environ 15 minutes. Le deuxième – 45 minutes.

Mon français est meilleur que mon anglais, car comme une idiote (encore une fois), je l’ai toujours privilégié au cours ma carrière au point même de recevoir un prix pour « ma contribution au rayonnement de la langue française et des valeurs de la Francophonie en Roumanie ». Fatale erreur.

Je commence demain mes cours d’anglais.

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Commentaires

Ruxandra Radoslavescu
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En France, l'article 225-1 du Code pénal définit une liste de critères qui entrent dans la constitution d'une discrimination :
« Constitue une discrimination toute distinction opérée entre les personnes : physiques à raison de leur origine, de leur sexe, de leur situation de famille, de leur grossesse, de leur apparence physique, de leur patronyme, de leur état de santé, de leur handicap, de leurs caractéristiques génétiques, de leurs mœurs, de leur orientation sexuelle, de leur identité sexuelle, de leur âge, de leurs opinions politiques, de leurs activités syndicales, de leur appartenance ou de leur non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée. »
L'article 225-1-1 du Code pénal y ajoute les actes discriminatoires faisant suite à un harcèlement sexuel :
« Constitue une discrimination toute distinction opérée entre les personnes parce qu'elles ont subi ou refusé de subir des faits de harcèlement sexuel tels que définis à l'article 222-33 ou témoigné de tels faits, y compris, dans le cas mentionné au I du même article, si les propos ou comportements n'ont pas été répétés. »
L'article 225-2 du Code pénal précise dans quelles situations la discrimination effectuée est répréhensible :
« La discrimination définie à l'article 225-1, commise à l'égard d'une personne physique ou morale, est punie de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 Euros d'amende lorsqu'elle consiste :
1° à refuser la fourniture d'un bien ou d'un service ;
2° à entraver l'exercice normal d'une activité économique quelconque ;
3° à refuser d'embaucher, à sanctionner ou à licencier une personne ;
4° à subordonner la fourniture d'un bien ou d'un service à une condition fondée sur l'un des éléments visés à l'article 225-1 ;
5° à subordonner une offre d'emploi, une demande de stage ou une période de formation en entreprise à une condition fondée sur l'un des éléments visés à l'article 225-1 ;
6° à refuser d'accepter une personne à l'un des stages visés par le 2° de l'article L. 412-8 du code de la sécurité sociale.
Lorsque le refus discriminatoire prévu au 1° est commis dans un lieu accueillant du public ou aux fins d'en interdire l'accès, les peines sont portées à cinq ans d'emprisonnement et à 75 000 Euros d'amende. »

Arthur FLORET
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Ton article me brise le cœur! Mais je comprends ce que tu ressens. Moi-même en tant que Français j'en ai un lot à raconter de ces mélanges des genres...
Néanmoins, est-ce que dans ce cas précis ce ne serait pas plutôt une différence entre le secteur public (en particulier un haut fonctionnaire) et le secteur privé?
STP ne jette pas le bébé et l'eau du bain, surtout pour passer chez les Anglais. La francophonie a des millions d'autres qualités!

cameliacusnir
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Mon coeur est aussi brisé...
On m'a attiré l'attention que ce n'est pas seulement la France qui connaît ce genre d'approches et j'en suis d'accord mais, moi, malheureusement, j'ai connu cet exemple.
C'est peut-être aussi une différence entre secteur public/privé. L'ironie est que, lors de mon deuxième entretien, le recruteur était privé mais c'était pour une position financé de fonds gouvernementaux également :).
En fait, j'ai hésité sur l'idée de contester la procédure de recrutement dans le premier cas. J'aurais pu le faire sans problème...
Et oui, la francophonie m'a apporté beaucoup de satisfactions mais aussi, dernièrement, beaucoup de déceptions.